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Interview 03 juin 2023, 09:18

La remontée en 2013, Jérémy Toulalan, le salto… Les souvenirs d’Emmanuel Rivière

La remontée en 2013, Jérémy Toulalan, le salto… Les souvenirs d’Emmanuel Rivière
Avant le coup de sifflet final de la saison 2022-2023 avec la réception de Toulouse ce samedi au Stade Louis-II (21h), nous sommes partis à la rencontre de l’ancien buteur passé par les deux clubs et présent à l’AS Monaco entre 2013 et 2014, où il a notamment connu la montée en Ligue 1. Rencontre.

Il a connu la remontée du Club dans l’élite ! Arrivé au mercato hivernal 2013, Emmanuel Rivière a fait partie du groupe qui a permis à l’AS Monaco de retrouver sa place en Ligue 1, sous les ordres de Claudio Ranieri. Grand artisan de la deuxième place synonyme de qualification en Ligue des Champions l’année suivante, ainsi que demi-finaliste de la Coupe de France et meilleur buteur des siens cette saison, le Martiniquais a accepté d’évoquer ses souvenirs en rouge et blanc, avant la rencontre face au TFC. Interview. 🎙

Bonjour Emmanuel. Tout d’abord, donne-nous de tes nouvelles…

Tout va bien, je suis auprès de ma famille, sur mon île natale je n’ai pas à me plaindre. Pour tout avouer, cet entretien me reconnecte avec le monde du football, que j’ai lâché depuis quelque temps. Mon dernier contrat remonte à deux ans maintenant.

Forcément mon idole, Thierry Henry, a joué là-bas, David Trezeguet également. Ce sont des attaquants auxquels je m'identifiais beaucoup et quand on voit le parcours qu'ils ont effectué ici, ça donnait envie de suivre leurs traces. 
Emmanuel RivièreCe qui l'a convaincu de venir à l'AS Monaco

Raconte-nous ton arrivée en Principauté !

Je n’ai eu aucun problème à mon arrivée, je me suis adaptée rapidement. J’avais la chance de connaître plusieurs jeunes dans le groupe et forcément c‘est une aide précieuse pour s’adapter. J’avais déjà des repères et au moment de ma venue (janvier 2013), l’équipe tournait extrêmement bien sportivement ce qui enlevait une part de la pression.

Qu’est-ce qui t’as motivé à venir ?

Sans aucun doute le projet sportif. Je venais de Ligue 1 à la base, de Toulouse, et revenir en deuxième division n’étais pas le chemin le plus logique sur le papier. Mais j’ai beaucoup discuté avec le Club et le projet me paraissait solide et m’a séduit. Un pari gagnant quand on voit les résultats par la suite.

À tes yeux, que représentait l’AS Monaco avant ta signature ?

L’AS Monaco fait partie des grands clubs de France. Forcément mon idole, Thierry Henry, a joué là-bas, David Trezeguet également. Ce sont des attaquants auxquels je m’identifiais beaucoup et quand on voit le parcours qu’ils ont effectué ici, ça donnait envie de suivre leurs traces. 

On avait un groupe très homogène et talentueux. Je me souviens d'une fête pour la montée où le coach Ranieri était venu passer la soirée avec nous. Il y a eu des feux d'artifices, c'était vraiment un bon moment de communion.
Emmanuel RivièreA propos de la remontée

Pour ton premier match, tu entres en jeu et tu inscris un but et délivres une passe décisive contre Arles-Avignon (0-2). Qu’est-ce que tu as ressenti ? 

C’était une sorte de délivrance. J’avais connu une période compliquée avant à cause des blessures. Ce match acte comme une sorte de nouveau départ dans ma carrière. Ce jour-là, mes frères et ma grand-mère habitaient à côté et sont venus me voir jouer pour ma première. Cela rajoute une dimension émotionnelle forte à cette rencontre et beaucoup de fierté. 

Comment avez-vous vécu cette remontée dans l’élite?

On l’a vécu comme l’aboutissement du travail effectué. La force de ce groupe, c’était l’état d’esprit ! On était comme une bande de potes, y compris avec l’ensemble du staff. Nous partagions tous les mêmes délires. On avait un groupe très homogène et talentueux. Je me souviens d’une fête pour la montée où le coach Ranieri était venu passer la soirée avec nous. Il y a eu des feux d’artifices, c’était vraiment un bon moment de communion.

Parle-nous de Claudio Ranieri, qui te fait venir en Principauté à ce moment-là. Quelle relation avais-tu avec lui ?

Les premiers temps, c’était compliqué car il y avait la barrière de la langue. Mais cela nous a permis de progresser chacun de notre côté, moi en Anglais et lui en Français. C’est un entraîneur qui n’a pas hésité à me faire confiance en m’accordant du temps de jeu. Lui et son staff d’ailleurs, car j’ai eu des pépins à la cheville mais j’ai été extrêmement bien accompagné et soigné. C’est quelqu’un avec qui j’avais une bonne relation.

Jérémy Toulalan c'est le travailleur de l'ombre, le type de joueur dont rêve un coach, toujours prêt à se sacrifier pour les autres. Ce type était une machine de guerre, il ne s'arrêtait jamais de courir.
Emmanuel RivièreSur le joueur qui l'a le plus impressionné

Tu as connu de sacrés joueurs durant ton passage, Radamel Falcao, James Rodriguez, Ricardo Carvalho Quels sont ceux qui t’ont le plus impressionné durant ces années au Club ?

Il y a eu de nombreux talents mais je vais en choisir deux. Le premier, c’est Jérémy Toulalan ! Parce que c’est le travailleur de l’ombre, le type de joueur dont rêve un coach, toujours prêt à se sacrifier pour les autres. Ce type était une machine de guerre, il ne s’arrêtait jamais de courir. Il faisait très attention à tous les éléments hors terrain, son alimentation, son sommeil.

Le deuxième, c’est notre capitaine de l’époque, Éric Abidal. C’est le mec le plus fédérateur, qui nous poussait sans arrêt à faire mieux que la veille. Comme Jérémy, il était tout aussi méticuleux dans sa préparation hors des terrains. Il s’impliquait à 100% à chaque séance. C’était vraiment un exemple pour nous tous. Je n’ai jamais vu un tel niveau de professionnalisme ailleurs. Un joueur et surtout un homme fabuleux. 

Une fois en Ligue 1, tu marques dès la première journée contre Bordeaux, c’était un moment fort pour toi ?

Ce match à une saveur particulière. Avec ce scénario serré, j’avais la volonté de renverser la vapeur et de rendre la confiance que le coach m’avait accordé. Une fois entrée en jeu, j’arrive à inscrire ce but improbable sur un contrôle de la fesse (rires) à dix minutes de la fin. Ça change complètement la face du match, qui était mal embarqué (victoire 0-2). Voilà à quoi tient ce sport parfois, c’est fou en y repensant. 

Le coach m'appelle et m'explique que je vais débuter demain, aux côtés de Radamel Falcao. Il me rassure en m'expliquant le système qu'il va utiliser, on l'avait déjà travaillé pendant la trêve estivale en amicaux. Je débute la partie et je fais le match de ma vie !
Emmanuel RivièreSon unique triplé

Parle-nous en un peu plus de cette victoire face à Montpellier (4-1)…

On s’entraîne tout au long de la semaine et il était prévu que je commence la rencontre sur le banc. Sauf que João Moutinho se blesse la veille. Le coach m’appelle et m’explique que je vais débuter demain, aux côtés de Radamel Falcao. Il me rassure en m’expliquant le système qu’il va utiliser, on l’avait déjà travaillé pendant la trêve estivale en amicaux. Je débute la partie et je fais le match de ma vie… je marque le seul triplé de ma carrière !

Avec le recul, c’est ton plus beau souvenir ?

En matière de football, non. Je pense que mon but face à l’Olympique de Marseille au Stade Vélodrome est plus fort. Déjà parce que j’évoluais dans un contexte où la concurrence était tellement forte que si je voulais avoir une chance de jouer à nouveau au moins quelques minutes, il fallait que je marque à tout prix. Je n’avais pas de marge d’erreur.

Mais ce que je retiens le plus lors de mon passage, c'est l'aventure humaine. Dès mon arrivée,  j'ai reçu un accueil et un suivi de l'ensemble du staff tout au long de la saison que je n'oublierai jamais. Il y avait une alchimie unique.
Emmanuel RivièreAncien buteur de l'AS Monaco

Puis parce que mon but permet à Monaco de gagner le match à seulement dix minutes de la fin. Je trouve que c’était un joli but en plus et avec ce scénario, ça rajoute du piquant. Mais ce que je retiens le plus lors de mon passage, c’est l’aventure humaine. Dès mon arrivée,  j’ai reçu un accueil et un suivi de l’ensemble du staff tout au long de la saison que je n’oublierai jamais ! Il y avait une alchimie unique.

Es-tu resté en contact avec certains joueurs ?

Oui quelques uns d’entre eux notamment Éric Abidal, qui est aussi originaire de Martinique. Quand il est de retour sur l’Île, on aime bien se voir pour partager un moment ensemble. Celui avec qui je m’entendais le mieux par dessous tout, c’était Layvin Kurzawa. Il venait aussi d’arriver en même temps que moi au Club, donc on s’est naturellement rapprochés et le feeling est super bien passé. 

Parle-nous de ta célébration, ce fameux salto ! Il y a une raison particulière pour ce geste ?

C’est qu’avec mes frères, on avait l’habitude de faire des saltos à la plage en Martinique quand nous étions enfants. Lorsque je célèbre en salto, c’est un clin d’œil pour ma famille et plus globalement à mon enfance. Par contre j’ai de plus en plus de mal à la faire avec l’âge (rires).

D'un autre côté, monter de la deuxième à la première division et terminer à la seconde place du championnat, c'est quelque chose d'assez unique dans l'histoire. 
Emmanuel RivièreLa saison en Ligue 1

La saison suivant le titre en Ligue 2, vous finissez deuxièmes du championnat et tu es le meilleur buteur de l’équipe. Quel bilan tires-tu ?

C’est un sentiment contrasté. D’un côté, il y a un peu d’amertume de ne pas être champion, en repensant à certains matchs, on se dit qu’en les négociants mieux il y avait vraiment la place pour faire quelque chose de plus grand. La demi-finale de Coupe de France perdue aux tirs aux buts contre Guingamp (3-1 A.P) fait mal, on avait un bon groupe tout à fait capable de repartir avec au moins un trophée. C’est ma seule désillusion et c’est comme ça que l’avait vécu le groupe à l’époque sur le moment.

Mais d’un autre côté, monter de la deuxième à la première division et terminer à la seconde place du championnat, c’est quelque chose d’assez unique dans l’histoire. Concernant mon titre de meilleur buteur de la saison, c’est toujours gratifiant mais il faut aussi dire qu’il est assez tronqué avec la blessure prématurée de Radamel Falcao. Puis j’ai aussi subi pas mal de pépins qui m’ont empêché de faire mieux.

On a évoqué ton passage à l’AS Monaco. Passons maintenant à ta carrière internationale avec la Martinique. Jouer pour ton Île de naissance, c’est quelque chose qui te tenait à cœur ?

Oui c‘est une immense fierté d’avoir porté les couleurs de mon pays. Je dois toute ma réussite à la fois en tant que professionnel et en tant qu’homme à cette île. Grandir dans ce cadre paradisiaque, avec mes journées rythmées par la plage et le football, au sein de mon club formateur, l’Espoir St Luce pour lequel j’ai une pensée.

Je veux remercier tous les formateurs qui m’ont accompagné dans ma progression. Avec le recul et l’âge, j’ai vraiment pris la mesure de la chance que j’ai eu d’avoir grandi ici. Jouer pour la Martinique sonnait comme une évidence, c’est normal de rendre ce que ce pays m’a apporté. C’était mon devoir. 🇲🇶

Rise. Risk. Repeat.