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Interview 27 juillet 2023, 19:12

Ses impressions, sa philosophie... Entretien avec le coach Adi Hütter

Ses impressions, sa philosophie... Entretien avec le coach Adi Hütter
Trois semaines après son arrivée en Principauté, et alors que la préparation des Rouge et Blanc s’intensifie, le nouvel entraîneur de l’AS Monaco a pris le temps de livrer ses premières impressions durant le stage en Angleterre. Entretien.

Il est seulement le deuxième coach autrichien à officier sur le banc du club du Rocher après Anton Marek dans les années 50 (1956-1958). Nommé au début du mois de juillet à la tête de l’AS Monaco, Adi Hütter continue à faire connaissance avec ses nouveaux joueurs, à mesure que la préparation des Rouge et Blanc avance. C’est donc pour nous parler de son ressenti, mais aussi pour nous en dire davantage sur lui, que le technicien autrichien s’est confié en longueur durant le stage à St-George’s Park. Rencontre. 🎙

Bonjour coach. Quelles sont vos premières impressions depuis votre arrivée à l’AS Monaco ?

Je suis vraiment très fier de m’être engagé avec ce magnifique club, qui possède une riche histoire. Quand je suis arrivé il y a deux semaines et demie (interview réalisée durant le stage à Birmingham, ndlr), c’était un peu spécial, car c’était tard le soir. Mais le lendemain quand je suis arrivé au Centre de Performance, c’était incroyable.

James Bunce et son équipe sont de grands professionnels, avec de grandes connaissances dans les domaines physique et athlétique notamment. Ils font tout pour me soulager en tant qu’entraîneur et nous aident beaucoup avec le staff technique, car nous avons énormément d’informations à enregistrer.
Adi HütterEntraîneur de l'AS Monaco

J’ai été impressionné par les infrastructures mais aussi par la profondeur du staff, car je n’avais jamais connu ça auparavant. J’ai vu des gens très professionnels, très accueillants et disponibles. Ils me font ressentir qu’il y a de la vie dans ce bâtiment ultra moderne. Et c’est le plus important pour moi. Je ressens vraiment que tout le monde a soif de succès, et fait tout pour la réussite du Club. Donc oui j’ai vraiment été impressionné.

En parlant du staff, il y a une cellule performance qui est taillée pour répondre aux défis du football moderne.

Bien sûr. James Bunce et son équipe sont de grands professionnels, avec de grandes connaissances dans les domaines physique et athlétique notamment. Ils font tout pour me soulager en tant qu’entraîneur et nous aident beaucoup avec le staff technique, car nous avons énormément d’informations à enregistrer. Ils préparent le programme de nos séances d’entraînement. Sincèrement, je n’avais jamais connu ce niveau de compétences. Chacun a vraiment des connaissances très importantes dans son domaine.

Lors de votre présentation à la presse, vous avez insisté sur la notion de famille. Est-ce une des raisons qui vous ont convaincu que vous aviez fait le bon choix en rejoignant Monaco ?

Aujourd’hui je pense que tout le monde veut retrouver l’Europe dans le Club. C’est un de nos principaux objectifs, difficile certes, de revenir sur la scène continentale. L’AS Monaco mérite de disputer des compétitions prestigieuses comme la Ligue des Champion. Et pour cela il faut terminer dans le haut de tableau. C’est un grand défi pour nous, et je pense que nous avons des chances de l’atteindre.

Nous allons en tout cas nous battre tous les jours pour le faire. Et pour ça, il est important de sentir l’appui de tout le monde derrière nous, et c’est ce que je ressens. Nous avons tous des métiers différents, mais gardons le même but en tête. C’est important d’être fier de travailler à l’AS Monaco et de tendre vers le succès, tous ensemble, dans la même direction. Toutes ces personnes autour de nous nous transmettent beaucoup d’énergies positives, et les joueurs doivent le ressentir.

Comme vous l’avez déjà dit, l’AS Monaco a une grande histoire. Que saviez-vous de celle-ci avant de rejoindre le Club ?

Récemment, j’ai évidemment suivi la saison 2016-2017 avec le titre de champion de France et cette belle campagne en Ligue des Champions. Mais bien avant cela, je regardais déjà l’AS Monaco dans les compétitions européennes surtout. Il y a toujours eu des grands joueurs ici, et j’ai pu m’en rendre compte lorsque je suis arrivé au Centre de Performance, avec ce mur à l’entrée. En le regardant, on se souvient que telle ou telle star a évolué ici. Je peux évidemment citer Kylian Mbappé, Radamel Falcao, Fabinho, Thierry Henry, David Trezeguet… Il y en a tellement !

J’aime que l’équipe développe un football agressif dans le bon sens du terme, proactif, avec une idée claire de la façon d’évoluer. Avec, aussi, la volonté d’imposer un état d’esprit conquérant, avec du caractère, à la perte de balle par exemple. C’est important que tout le monde se retrouve dans cette vision.
Adi HütterSur sa nomination

Ce club a vraiment une histoire forte. Mais aussi une très bonne académie ce qui est primordial. Car j’aime développer les jeunes talents, les accompagner jusqu’à devenir de grands joueurs. Et en cela, l’Academy est un outil formidable pour accompagner nos jeunes vers le haut niveau et notre équipe première. Car outre revenir en Europe, nous devons faire grandir nos meilleurs jeunes. C’est notre challenge, et c’est une histoire d’équilibre. Car à la fin, il faut être couronné de succès.

Pour parler un peu plus de vous, pouvez-vous nous dire quel coach vous êtes ?

J’aime que l’équipe développe un football agressif dans le bon sens du terme, proactif, avec une idée claire de la façon d’évoluer. Avec, aussi, la volonté d’imposer un état d’esprit conquérant, avec du caractère, à la perte de balle par exemple. C’est important que tout le monde se retrouve dans cette vision. Ensuite en tant que coach, je communique beaucoup. Je dois être également un leader, même si je préfère dire « team player », comme Thiago (Scuro) l’avait si bien dit.

A la fin, c’est moi qui prend les décisions, mais je me dois de faire converger tout le monde, toutes les énergies, vers le même objectif. J’aime aussi entretenir une relation avec mes joueurs, mettre en place des entretiens avec eux, car derrière chacun il y a un être humain. Donc je veux créer ce lien, car à la fin ce sont les joueurs qui sont sur le terrain, ce n’est pas moi. Nous devons ainsi tout faire pour qu’ils soient tous dans les meilleures conditions.

Pourquoi est-il si important de jouer de façon agressive dans le football moderne ?

Je pense que le football a beaucoup évolué. Et personnellement je n’aime pas trop faire tourner le ballon avec des passes horizontales dans notre propre partie de terrain. Quand vous regardez notre match contre le Cercle Bruges et celui face au Betis, il y a une grande différence, c’est incomparable. Le Cercle jouait de façon très directe, tandis que le Betis jouait beaucoup au ballon dans sa moitié de terrain. Pour nous c’est évident que c’était plus simple de presser.

Pour le développement, la préparation de la saison, le fait de montrer aux joueurs qu’il faut toujours faire plus. Cela sert également à travailler l’état d’esprit et les faire adhérer à mes idées, que je dois leur transmettre. C’est d’ailleurs la plus grosse difficulté, la transmission.
Adi HütterSur l'intérêt du stage de prépa'

Nous nous sommes entraînés de manière à jouer verticalement, et c’est grâce à cela que nous avons créé neuf grosses situations en première période contre les Espagnols. Nous n’avons malheureusement pas réussi à marquer, mais la façon de jouer était très intéressante. Et puis nous n’avons laissé aucune ouverture à l’adversaire, en restant très compacts derrière. C’est comme ça que nous voyons le football.

Après le match, vous avez dit que les résultats des rencontres amicales vous importent peu, mais que vous regardez avant tout le contenu…

Évidemment ! Quand vous arrivez à imposer vos principes, tôt ou tard vous connaissez le succès. Contre le Betis Séville encore une fois nous méritions cette victoire (1-3). Ensuite les matchs amicaux vous permettent de voir à quel point les joueurs ont assimilé ce que l’on travaille au quotidien à l’entraînement. Et j’ai constaté que nous avions beaucoup progressé entre ces deux matchs. Tout le monde était logiquement satisfait de ce résultat, de ce premier succès en pré-saison. Mais à la fin l’objectif reste de préparer l’équipe pour la Ligue 1.

Expliquez-nous quelle est l’importance d’un stage de préparation ?

Pour le développement, la préparation de la saison, le fait de montrer aux joueurs qu’il faut toujours faire plus. Cela sert également à travailler l’état d’esprit et les faire adhérer à mes idées, que je dois leur transmettre. C’est d’ailleurs la plus grosse difficulté, la transmission. Ensuite l’objectif est de se préparer physiquement, et nous avons eu la chance à St-George’s Park de bénéficier de superbes installations. En plus d’avoir une température acceptable, car il fait très chaud en ce moment à Monaco.

C’était un jour magnifique ! Imaginez la sensation des supporters et de tous les gens qui aiment le club, ils n’avaient pas connu cette joie depuis plus de trente ans. Ils n’imaginaient même pas que cela pouvait arriver, car le FC Bâle était devenu comme le Bayern Munich en Allemagne, le club intouchable.
Adi HütterSur le titre acquis avec les Young Boys

Et puis nous avions deux très bons matchs à jouer contre le Betis Séville et Leeds. C’était donc l’occasion pour moi de montrer à l’entraînement ce que je veux voir au coup d’envoi. Enfin, c’est aussi une opportunité de faire des activités de team building, car vous avez besoin de temps pour que chacun apprenne à connaître l’autre. C’est aussi mon travail avec le staff, de construire cette relation.

Pour revenir sur vos expériences passées, vous avez été champion avec les Young Boys de Berne, 32 ans après le dernier titre du club. Racontez-nous…

C’était un jour magnifique ! Imaginez la sensation des supporters et de tous les gens qui aiment le club, ils n’avaient pas connu cette joie depuis plus de trente ans. Ils n’imaginaient même pas que cela pouvait arriver, car le FC Bâle était devenu comme le Bayern Munich en Allemagne, le club intouchable. Nous avons changé beaucoup de choses pour atteindre cet objectif, en faisant progresser de jeunes joueurs et en imposant un football attractif.

Mais encore une fois cette année était exceptionnelle, nous étions en tête du championnat avec 15 points d’avance, c’était énorme. Aujourd’hui le club enchaîne les succès avec cinq titres de champion de Suisse d’affilée, et tout le monde est ravi de voir comment jouent les Young Boys.

Vous rappelez-vous qu’à un mois près vous auriez pu jouer contre l’AS Monaco en barrages de Ligue des Champions ?

Oui je me rappelle que Berne avait perdu 4-0 et j’ai ensuite remplacé Uli Forte qui entraînait l’équipe à ce moment-là. Juste avant, ils avaient affronté une équipe du Kazakhstan, le FK Qarabag, puis je suis arrivé sur le banc en septembre 2015. Je n’ai donc pas eu l’occasion de jouer contre Monaco à ce moment-là, mais quelques années plus tard lors de l’été 2020 en match amical (1-1).

Vous avez en tout cas affronté d’autres équipes françaises en Ligue Europa !

Oui c’est vrai, Marseille en 2019. Mais avant cela nous avons d’abord joué Strasbourg en phase de poules. Nous étions dans la même poule que le Racing, avec l’Apoel Nicosie et la Lazio Rome, et avons réussi à faire un sans faute en gagnant nos six matchs. C’était vraiment une très bonne saison ! Je me rappelle que nous avions d’ailleurs gagné 5-0 contre le Bayern Munich. Mais nous avons fait une très bonne première partie de saison, puisque nous étions quatrièmes au classement.

Et puis cette épopée européenne était incroyable, car nous éliminons successivement le Shakhtar Donetsk, l’Inter Milan et Benfica. Avant de sortir malheureusement en demi-finale en faisant deux matchs nuls contre Chelsea. Rendez-vous compte, en 14 matchs de Ligue Europa, nous n’avons perdu qu’une fois et c’était contre Benfica ! C’était vraiment une saison fantastique. J’ai donc joué effectivement quelques fois contre des clubs français, avec une bonne réussite à la clé.

Je dirais que c’est un peu plus facile effectivement pour moi, puisque Breel parle allemand et qu’il y a également d’autres joueurs germanophones dans l’équipe. Donc avec eux il n’y a pas la barrière de la langue. Takumi est lui arrivé en 2015 à Salzbourg, il était très jeune. Et aujourd’hui il est ici et j’en suis très heureux, car j’aime les joueurs japonais.
Adi HütterA propos de ses deux anciens joueurs

Vous avez connu un ancien joueur formé à l’AS Monaco à Francfort, Almamy Touré

J’aime beaucoup Almamy, c’est un super gars. J’ai gardé de bons contacts avec mes joueurs à Francfort, où j’ai vécu des choses fortes. Malheureusement pour lui, il a souvent été embêté par les blessures, mais c’est vraiment une personne formidable.

En Allemagne, vous comptez près de 40% de victoires contre le Bayern Munich. Avez-vous un secret ?

Je ne sais pas s’il y a une recette contre le Bayern Munich. En tout cas c’est vrai que j’ai réussi plusieurs fois à battre cette équipe, avec ce fameux 5-0 avec Mönchengladbach, dont un doublé de Breel Embolo. Je crois que ce succès est le plus beau de ma carrière d’entraîneur jusqu’à maintenant. C’était fantastique !

A Monaco, vous retrouvez donc Breel et Takumi, que vous avez connu auparavant. Est-ce une aide pour vous, pour faire passer des messages ?

Je dirais que c’est un peu plus facile effectivement pour moi, puisque Breel parle allemand et qu’il y a également d’autres joueurs germanophones dans l’équipe. Donc avec eux il n’y a pas la barrière de la langue. Takumi est lui arrivé en 2015 à Salzbourg, il était très jeune. Et aujourd’hui il est ici et j’en suis très heureux, car j’aime les joueurs japonais. Ils se dépensent beaucoup sur le terrain, sont de vrais combattants. C’est donc une chance pour moi de retrouver des joueurs que je connais bien.

Pour terminer cet entretien, que souhaitez-vous dire aux supporters du Club ?

(Spontanément) DAGHE MUNEGU !! 🇲🇨

Rise. Risk. Repeat.