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Médias 26 décembre 2021, 16:00

David Berger : "J’ai commenté plus de 100 fois l’AS Monaco en 25 ans"

David Berger : "J’ai commenté plus de 100 fois l’AS Monaco en 25 ans"
Ils vous font vivre les matchs comme si vous y étiez. Pendant les fêtes de fin d’année, asmonaco.com vous propose une série d’entretiens avec les grands témoins des médias, qui ont des souvenirs marquants avec les Rouge et Blanc. Aujourd’hui, rencontre avec David Berger.

Il est un enfant de la maison Canal+ ! Embauché dans les années 90 par la chaîne cryptée, il commente la Ligue 1 et le foot en général depuis 25 ans. Tu connais donc forcément sa voix, qui accompagne également les résumés de matchs du Canal Football Club depuis son lancement en 2008. Né à Saint-Etienne avec la fièvre du ballon rond, David Berger est un des journalistes qui a le plus couvert l’AS Monaco. Michel Hidalgo, Luc Sonor, Alain Roche, Franck Sauzée, Jérôme Rothen… Ils se sont tous succédés à ses côtés. Rencontre avec un amoureux du championnat de France… et de la Principauté ! Entretien.

Bonjour David. Tout d’abord, qu’y a-t-il de si spécial à Monaco ?

J’aime ce stade ! Cela fait 25 ans que je commente les matchs pour Canal+, et je tiens un décompte de chaque rencontre. J’ai commenté plus de 100 fois l’AS Monaco, et je suis allé plus de 50 fois au Stade Louis-II. C’est un peu comme si j’avais fait trois saisons d’affilée à domicile. Ce n’est pas le plus beau stade de France, mais j’ai un amour particulier pour lui. Évidemment il y a le contexte climatique, surtout quand on arrive du nord de la France, de Paris. Mais j’aime avant tout ce stade car il est très atypique. Cela va de l’entrée de l’enceinte, où les gens sont adorables.

Ensuite c’est très particulier parce que c’est un véritable labyrinthe. On arrive sur cette piste d’athlétisme, où on découvre si la bâche princière est déployée ou pas, ce qui nous indique que S.A.S. le Prince Albert II va venir ou pas. Et puis il y a cette proximité avec toutes les personnes qui font partie de l’encadrement, du Stade, de la sécurité et évidemment du staff. Il y a une complicité, un accueil et une convivialité qui s’installe naturellement à Monaco. Même l’entrée des joueurs qui se fait en face de la position commentateur, tout est vraiment spécial ici.

Mon fils qui a 9 ans, a été fan de ce club dès l’âge de 3 ans. Allez comprendre pourquoi ? Les couleurs rouge et blanche. La Diagonale. Le mot "Monaco", qui est facile à dire pour un enfant. Il est dingue de cette équipe depuis 6 ans.
David BergerCommentateur sur Canal+

C’est un lieu chargé d’histoire…

Exactement. Il y a un vrai trait d’union avec le passé, puisque c’est l’un des seuls stades qui n’a pas bougé depuis 36 ans (1985). Un lien direct avec mon adolescence. J’ai l’impression de voir la même atmosphère, le même contexte depuis que je suis gamin, donc les années passent et l’AS Monaco reste le même. A l’heure où tous les stades sont construits, rénovés, celui-là marque une continuité dans toute mon existence. Et puis le parallèle sympa aussi, c’est que mon fils qui a 9 ans, a été fan de ce club dès l’âge de 3 ans. Allez comprendre pourquoi ? Les couleurs rouge et blanche. La Diagonale. Le mot « Monaco », qui est facile à dire pour un enfant. Il est dingue de cette équipe depuis 6 ans, donc en résumé j’ai un attachement très particulier à ce club.

Quel est votre regard sur la présence de nombreux supporters de l’AS Monaco partout en France ?

C’est un contraste très étonnant avec le Stade Louis-II, qui sonne malheureusement parfois creux. J’ai commenté une cinquantaine de matchs des Rouge et Blanc à l’extérieur, et je constate qu’il y a vraiment un noyau dur, un groupe qui s’est constitué. J’étais encore récemment à Clermont-Ferrand (l’interview a eu lieu le 3 décembre dernier), et il y avait 500 ou 700 supporters monégasques dans le parcage adverse. Parfois je fais le parallèle avec la Juventus Turin, qui est très appréciée partout en Italie, alors qu’à domicile, on dit souvent que dans la ville on préfère le Torino. Monaco, c’est une équipe qui rassemble en dehors de la Principauté.

Je pense que ça vient de ce passé glorieux, avec tellement de joueurs talentueux qui sont sortis de ce club, et qu’on retrouve aujourd’hui ! Je pense évidemment à Ludovic Giuly et Jérôme Rothen, qu’on croise régulièrement. Mais aussi à des noms comme Mark Hateley, Glenn Hoddle, Radamel Falcao, Didier Deschamps qui a entraîné, George Weah… Il y a des joueurs extraordinaires qui sont passés par Monaco et qui ont fasciné n’importe quel dingue de foot.

Eric Huet est le supporter numéro un de l’AS Monaco parmi les journalistes, c’est certain. C’est une bible du club ! Il vivait intensément ses matchs, et quand on le croisait le lendemain matin au bureau avec la mine basse, c’est que les Rouge et Blanc avaient perdu.
David BergerCommentateur sur Canal+

Vous avez été à bonne école avec un certain collègue…

Bien sûr, j’ai été très bien placé avec mon partenaire Eric Huet, qui est le supporter numéro un de l’AS Monaco parmi les journalistes, c’est certain. C’est une bible du club ! Il vivait intensément ses matchs, et quand on le croisait le lendemain matin au bureau avec la mine basse, c’est que les Rouge et Blanc avaient perdu. On ne peut pas détester Monaco. Et d’ailleurs je le vois dans l’exercice de mon métier. Ce qui booste l’antenne, c’est évidemment le Paris Saint-Germain ou l’Olympique de Marseille. Mais l’ASM ne laisse pas indifférent, certainement grâce aux nombreuses épopées européennes. On a envie de regarder jouer cette équipe, parce que c’est plaisant. Et c’est ce côté spectacle qui est important. On n’est jamais indifférent à des joueurs hors du commun. Il y a cette griffe monégasque, qui fait que cette équipe a rarement été « chiante » à voir jouer.

Gardez-vous un souvenir particulier d’un match passé aux côtés d’Eric Huet ?

Oui justement j’ai souvenir d’un mutliplex. On joue la dernière journée de championnat, et Monaco perd et finit troisième je crois, à cause d’un but encaissé à la fin du match. Et quand il commente le but, il ne peut pas s’empêcher de dire : « Oh la la… ». Je me souviens de ce moment que je me suis repassé en boucle. Il est dépité, c’est la fin du monde pour lui.

Vous parliez du beau jeu. Est-ce le trait d’union des différentes générations ?

Le point commun de ces décennies d’histoire, ce sont des personnalités, des personnages qui ont été très marquants. Il y a eu l’époque Delio Onnis, à la fin des années 70. Il y a eu ensuite la génération Hateley-Hoddle à la fin des années 80. Didier Deschamps qui emmène loin cette équipe en Europe en 2003-2004. Et puis il y a des exploits ! Des matchs mythiques. C’est ce qui arrive à forger la popularité d’un club hors des frontières. Quand il y a des exploits, des rebondissements, des qualifications au forceps avec des grands joueurs, comme Fernando Morientes contre le Real et même plus récemment le duo Fabinho-Bakayoko au milieu contre City. James Rodriguez, Radamel Falcao… D’autant que nous qui avons la chance de les côtoyer, je me rends compte aujourd’hui qu’il n’y a pas cette barrière à Monaco, qu’il peut y avoir par exemple avec les stars du PSG. Aussi bien avec les supporters qu’avec les journalistes.

Vous voulez parler de la proximité qui n’existe nulle part ailleurs ?

A Monaco, je croisais très souvent les Thomas Lemar, Djibril Sidibé, James Rodriguez, Radamel Falcao… Ce sont des stars, mais ils avaient toujours le sourire. On les croisait, et il y avait un échange avec eux. J’ai en tête le dernier match que j’ai fait ici récemment. Quelques minutes après le match, on rentre à l’hôtel, et on croise Alexander Nübel sur le trottoir. Il était avec son sac à doc et il rentrait chez lui ! C’est ça l’AS Monaco, c’est du jamais vu dans le football moderne. Cette proximité, cette simplicité avec des grands joueurs. Cela fait qu’on aime cette équipe.

Est-ce qu’elle vous a permis de vivre des moments privilégiés avec certains joueurs ?

Il y a un moment qui m’a marqué à vie. J’étais avec Alain Roche, on venait de commenter un match, et on a passé 20 minutes avec Kylian Mbappé et sa maman, Faïza. C’était en 2016, et il n’avait que 16 ans et demi. Il n’était pas titulaire, vivait encore au centre de formation, et commençait à faire ses premiers pas avec l’équipe première. A la fin du match, on se retrouve nez à nez avec eux, et il nous salue, très intimidé. Il regardait déjà 4 ou 5 matchs par week-end, donc il nous connaissait. Sa maman disait : « Il faut quand même que tu travailles bien à l’école et que tu fasses tes études ». Il était tout penaud. J’ai senti un gamin timide, qui adore le foot, ne vit que pour ça. Il m’annonçait que pour la première fois, il avait une chambre individuelle au centre.

Je lui ai dit qu’il venait de faire un match extraordinaire et qu’il avait un super bel avenir devant lui. Après ces 20 minutes, Alain Roche et moi nous sommes dit qu’on se souviendrait longtemps de cette discussion. J’ai commenté 1200 matchs dans ma vie, et autant on peut se tromper sur certains joueurs, autant on sentait qu’il se passait quelque chose avec lui. S’il ne déconne pas et ne se blesse pas, nous sommes persuadés à ce moment-là qu’il va aller très très haut. Et typiquement, cet entretien informel qu’on a eu avec ce jeune, jamais nous n’aurions pu l’avoir ailleurs. Ils sont toujours très protégés. Il n’y a qu’à Monaco qu’on peut avoir un tel souvenir.

Je suis très pote avec Jérôme Rothen. On se croisait aux trophées UNFP sur Canal+ et aux oscars du foot, où tous les joueurs venaient, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui depuis 5-8 ans. Avant c’était la fête du foot, on échangeait.
David BergerCommentateur sur Canal+

Avez-vous gardé des liens avec des anciens joueurs du Club ?

Je suis très pote avec Jérôme Rothen. On se croisait aux trophées UNFP sur Canal+ et aux oscars du foot, où tous les joueurs venaient, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui depuis 5-8 ans. Avant c’était la fête du foot, on échangeait. C’est comme les avant-matchs à Monaco. On arrive à discuter avec les joueurs. Ce n’est pas du tout le cas ailleurs. Et ça c’est historique, c’est une tradition. Il y a aussi Ludovic Giuly, que je revois aujourd’hui et avec qui je me suis toujours très bien entendu. Didier Deschamps aussi. Même Valère Germain ! Une fois je lui ai demandé de faire une vidéo pour l’anniversaire de mon fils qui l’adore, et il m’a dit oui tout de suite. On sort parfois de notre cadre de journaliste d’investigation, et il y a un échange assez systématique depuis 25 ans qui est très amical.

Quels sont les matchs de l’AS Monaco qui vous ont particulièrement marqué ?

Cela va peut-être trancher avec mes confrères, mais celui qui me revient tout de suite en mémoire et que je garde en exemple, c’est le Monaco – PSG de novembre 2020. C’était il y a un an, et il m’a marqué parce que je commentais avec un ancien monégasque, José-Karl Pierre-Fanfan. Il y avait 2-0 à la mi-temps. Nous étions en novembre, avant la fin de la phase aller, mais ce jour-là je me disais : « Paris a tué le championnat, c’est plié ». Et puis je vois Niko Kovac, tout agité, qui encouragerait ses joueurs, là où pleins d’autres entraîneurs auraient juste voulu stopper l’hémorragie pour ne pas se prendre un 6-0. J’ai su après ce qu’il avait dit à la mi-temps dans le vestiaire : « Les gars, on va le gagner ce match ! ». Il y a eu un changement radical en seconde période, et l’AS Monaco gagne 3-2, avec l’expulsion de Layvin Kurzawa.

Pour moi c’est le match symbole de ce que Monaco peut faire dans son histoire. Être capable du pire comme du meilleur. Et surtout j’aimerais mettre un coup de projecteur sur ce coach, Niko Kovac. Il est solaire. A chaque fois que j’ai l’occasion de l’interviewer, il est d’un respect, d’une bonne humeur incroyable. J’aime à la fois l’homme et l’entraîneur. Il a typiquement le profil de l’entraîneur moderne, qui ne pense qu’à gagner, et pas à éviter l’humiliation. Il y a peu d’entraîneurs en Europe, qui, à la mi-temps d’un match où vous êtes menés 2-0 à domicile par le PSG, seraient capables de dire cela à ses joueurs. Il transcende. Pour moi c’est le match référence de l’ère moderne et de l’ère Kovac.

Je me souviens avoir discuté avec David Trezeguet et Thierry Henry dans le vestiaire des Bleus le 12 juillet 1998, et avoir dit à ce dernier : "Tu te rends compte, tu es un gamin et tu es champion du Monde !". Il pleurait presque dans mes bras.
David BergerCommentateur sur Canal+

L’AS Monaco, c’est aussi ce maillot atypique…

Bien sûr ! Moi je suis né à Saint-Etienne en 1969, donc quand j’étais gamin, il y avait une équipe qui faisait vibrer les Français, c’était les Verts. A l’âge de 6 ans, je faisais déjà la collection des vignettes Panini. Alors le maillot rouge et blanc, forcément, ne laissait jamais indifférent. Très atypique encore une fois. D’ailleurs j’ai une anecdote à ce sujet. Il y a un an sortait la réédition du maillot mythique du titre de 1988. On m’a demandé de le présenter à l’antenne. Je l’ai montré, et on me l’a offert ! Ça tranche avec d’autres clubs, que je ne vais pas citer, mais qui nous demandent aussi de montrer des maillots collectors, mais qui le reprennent derrière. C’est la gentillesse, la classe de ce club qui a du savoir-vivre, qui vit de son passé, mais qui sait en même temps aller de l’avant et se moderniser. Le raccord avec les heures passées, ça me plait. C’est un club qui n’oublie pas. Il y a deux ans je crois, chaque coup d’envoi était donné par un ancien joueur, et ça je trouve ça bien.

Pour finir, quel est votre plus grand souvenir de fan de foot ?

Je crois qu’il n’y a pas de débat, car j’étais présent dans les tribunes du Stade de France le 12 juillet 1998, jour de la finale de la Coupe du Monde. Et j’ai eu la chance justement d’aller dans le vestiaire, et de toucher ce trophée magnifique. J’avais le maillot de l’équipe de France, et tous les joueurs, Zidane, Djorkaeff… ont signé mon maillot ! Depuis il est encadré chez moi, sous verre. Je me souviens avoir discuté avec David Trezeguet et Thierry Henry, et avoir dit à ce dernier : « Tu te rends compte, tu es un gamin et tu es champion du Monde ! ». Il pleurait presque dans mes bras. Je l’ai retrouvé d’ailleurs récemment, puisqu’il travaille chez Amazon désormais, et il m’a demandé comment j’allais. Il aurait très bien pu m’oublier, mais voilà cette convivialité qu’on ne retrouve pas ailleurs, tu l’expérimentes même dans des moments comme ça. Ce sont des gars biens et pourtant ce sont des stars.

Vous avez d’ailleurs commenté des matchs avec des anciens monégasques…

Bien évidemment. J’ai eu la chance de commenter en compagnie de Michel Hidalgo, qui a porté le maillot de l’AS Monaco. Avec Luc Sonor également, Didier Deschamps, Ludovic Giuly et Jérôme Rothen. D’ailleurs, dernière petit chose marrante. Lorsqu’on vient pour un match, on dort à l’hôtel Marriott, qui est juste à côté du stade, mais qui n’est pas à Monaco, mais à Cap d’Ail. J’ai toujours trouvé ça génial de faire 30 mètres à pied et de rentrer dans le Stade Louis-II et de voir ce bus de l’équipe adverse, qui est parfois obligé de faire tout le tour du stade, alors qu’il n’y a que quelques pas à faire. C’est très original.

Rise. Risk. Repeat.